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Par Enzo Vincent

La caractérisation du harcèlement, qu’il soit moral ou sexuel, sur le plan judiciaire, se heurte à une forte difficulté probatoire. Une difficulté probatoire causée par l’importante place laissée au subjectivisme au sein des procédures. Une difficulté qui peut, semble-t-il, être éludée par l’essor d’une alternative : la justice médiatique. 

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Justice. Organiquement, l’institution chargée d'exercer le pouvoir judiciaire, d'appliquer le droit. Matériellement, le respect du droit d’autrui ; le principe moral qui exige le respect du droit et de l’équité. L’ambivalence de « justice » est que, sous appellation vertueuse, celle-ci incarne une procédure ; l’acception commune de « justice » affère au principe moral. 

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Ceci dit, concentrons-nous d’abord sur l’aspect procédural du concept : l’agonistique judiciaire. L’exposition d’une vérité parfois indémontrable, ce à quoi se livrent les parties, au travers de ceux qui prêtent leurs voix, par axiomes interposés, introduit cette agonistique : au juge de trancher in fine. Quatre garanties procédurales siéent au propos : la publicité du procès, la prescription, la présomption d’innocence, puisqu’à l’accusé profite le doute et enfin l’impartialité morale, puisqu’à l’entrée du tribunal s’arrêtent nos affects communs. 

 

La difficulté probatoire en matière de harcèlement et ses enjeux

 

La multiplicité des affaires et cas de harcèlements moraux et sexuels au travail démontre une réalité souvent occultée ; de même qu’elle révèle une incapacité de la justice à se saisir d’événements dont la qualification est hautement subjective. Comme le souligne Eliott Pousset, étudiant en Master II Droit des Relations de Travail dans l’Entreprise, « la difficulté probatoire en matière de harcèlement au travail provient d'abord du milieu de travail lui-même » ; en effet, il s’agira ensuite de jongler entre différents intérêts en présence. D’une part, l’employeur, dont les techniques managériales peuvent prêter à confusion et dépendent de l’appréhension subjective de chacun : le harcèlement moral, et les éléments factuels le sous-tendant, de même que l’incongruité d’une parole sur le plan sexuel, dépendent de cela. Et d’autre part, les salariés qui, toujours selon Eliott Pousset, « peuvent ne pas oser lancer l'alerte sur les atteintes qu'ils subissent, par peur de représailles » ; à la fin ce déliement de la parole s’amorcera par le biais d’associations, d’individualités médiatisées. 

Techniquement, il appartient « au salarié qui se prétend victime de présenter au juge prud’homale les éléments de faits induisant le cas de harcèlement », précise Eliott Pousset, à ce dernier d’en apprécier la teneur souverainement ; qu’ainsi, si la conviction du juge est emportée, s’opère un renversement de la charge de la preuve à l’encontre de l’employeur qui devra prouver l’absence de harcèlement, quel qu’il soit. 

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Récapitulons. La preuve d’un harcèlement, compte tenu du volume de subjectivisme y étant intégré, est éminemment complexe, « en pratique, une véritable bataille d'attestations se déroule sous les yeux du juge prud’homale » souligne Eliott Pousset ; cela se traduisant souvent en une absence de plainte, sur le plan judiciaire, au profit d’une dénonciation anonyme, ou non, sur le plan médiatique. 

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Reprenons alors nos quatre garanties initiales. La sphère médiatique permettra d’assurer, par son ampleur, la publicité, d’exempter les faits de toute prescription, d’abandonner la présomption d’innocence à la condamnation directe, puisqu’à la lecture d’un journal nous sommes empreints d’affections communes. Dès lors, si la sphère médiatique devient l’alternative au tribunal ; si notre culture, notre éducation, s’apprécient en une législation personnelle ; c’est bien qu’une part de la justice ignore nos idiosyncrasies et qu’une légitimité s’extirpe de ces vengeances publiques ; de ces procédures infamantes. Dit autrement, l’incapacité de la justice à saisir ces problématiques induit notre responsabilité dans le changement des comportements.

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